La Provence aux portes du désert

La sécheresse et la canicule 2022 révèlent et accélèrent, le changement climatique. Toujours plus chaud et sec, il a amorcé de longue date la désertification du sud de la France et la réduction de son potentiel hydroélectrique.

Le détournement de la Durance, de Serre-Ponçon à l'étang de Berre, tarit la rivière et ses nappes phréatiques, ces sources qui fournissent 75% de l'eau consommée en PACA. Il contribue ainsi au changement du climat

Les méfaits conjugués du changement climatique et du détournement de la Durance, préparent l'oued Durance dans le désert du sud de la France, annoncé pour 2050.

L'eau est désormais la priorité absolue.

 

I - Les méfaits directs du détournement de l'eau de la Durance

Depuis 1966, le canal usinier décidé par la loi de 1955, détourne 95% de l'eau de la Durance à partir de Serre-Ponçon et la déverse dans l'étang de Berre. Le détournement est illustré, quantifié par les diagrammes suivants.

La Durance réduite à l'état de squelette de rivière

durance debits

Débits naturels et débits actuels de la Durance

Ces diagrammes sont dus à mesdames Juramy et Montfort de l'Institut géographique Aix en Provence. Ils donnent la moyenne des débits de la Durance en m³/s sur une année normale. Ils illustrent le détournement Le détournement de la Durance assèche le val de Durance. Il contribue à la sécheresse globale et réduit ainsi le potentiel hydroélectrique qui l'a justifié.

Il tue la poule aux œufs d'or.
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La Durance réduite à l'état de squelette. Nous avons ajouté les restitutions imposées par voie juridique depuis 2007.
Modalités violées en 2018.

À partir de Serre-Ponçon, toute l'eau de la rivière transite dans le canal usinier, 7200 Mm³ en année normale. Elle est turbinée.

La moitié de cette eau, 3600 M³/an, est distribuée aux « ayant-droit historiques » par les canaux ; dont Manosque, De Provence, Marseille, Craponne, Carpentras.

Depuis 1966, l'autre moitié, 3600 Mm³/an, est déversée dans l'étang de Berre.

Le détournement de la Durance a trois effets insupportables :

  1. Tarissement de la source
    À partir de Serre-Ponçon, la Durance et les nappes phréatiques associées à la rivière, sont asséchées, dégradées, hors d'usages : elles tarissent. Depuis 1966 leur tarissement est chaque année plus grave : Relevés actualisés du BRGM
  2. Destruction de l'étang de Berre
    Depuis 1966, la moitié de l'eau de la Durance, 3600 Mm³/an, est déversée dans l'étang de Berre.
    Les rejets sont massifs et intermittents en fonction des besoins et de l'eau disponible.
    De juin à septembre les rejets d'eau douce sont réduits ; d'octobre à mars ils sont très importants.
    La salinité de l'étang, étang marin à l'origine, varie de 10g/l à 30 g/l. L'étang est invivable. Détruit. Effet immédiat.
  3. Gaspillage de l'eau rejetée dans l'étang
    L'eau arrive à la centrale par un canal en béton, sans vie, sans même alimenter des nappes phréatiques.
    Arrivée dans l'étang elle est dénaturée, inutilisable, gaspillée !

II - Assurer la priorité absolue à l'eau

Faute de pouvoir provoquer la pluie et rafraîchir l'atmosphère, nous pouvons contribuer à la lutte contre le changement climatique, en mettant un terme au détournement de la Durance et à ses méfaits.

Depuis 2007, suite à la condamnation de la France par la justice européenne saisie par la Coordination des Pêcheurs soutenue par L'Étang Nouveau, les rejets dans l'étang de Berre sont limités à 1 200 Mm³/an. L'eau indésirable dans l'étang, 2400 Mm³/an, est restituée à la Durance par le déversoir de Mallemort à la cote 123. Les conditions de restitution ne sont pas satisfaisantes. Il faut améliorer la restitution en l'échelonnant, et l'amplifier, en arrêtant le gaspillage de l'eau douce par rejet dans l'étang soit 3 600 Mm³ en année normale.

  1. Arrêt du gaspillage intolérable de l'eau par rejet dans l'étang de Berre.
    L'arrêt de ces rejets imposé par le sécheresse depuis février 2022, permet à l'étang de retrouver une vie marine intense, dont le stock exceptionnel de palourdes qui permet d'en augmenter le prélèvement par les pêcheurs professionnels. C'est la vie d'un développement durable de l'étang comparable à celui de l'étang de Thau.
  2. Restitution échelonnée à la Durance d'un partie de l'eau ainsi économisée, depuis Serre-Ponçon, La Saulce, Sisteron, Cadarache-Jouques.
    Le débit de restitution peut être le même sur les quatre sites. Le débit de la rivière augmente par fractions égales. Le débit ponctuel de restitution sur ces quatre sites est fonction du débit maximum des canaux à la cote 123, ultime étape à laquelle le total des restitutions doit atteindre 3 600 Mm³ en année normale.
  3. Canal d'irrigation
    Canal d'irrigation
    Remise en eau permanente des canaux Crau, Alpilles, Comtat Venaissin à la cote 123.

    Pour évacuer l'eau déversée dans l'étang de Berre et recharger la nappe, certains proposent de creuser un canal à travers la Crau pour évacuer l'eau déversée dans l'étang de Berre et recharger la nappe phréatique de Crau. Inutile d'en creuser un autre… Il faut seulement remettre en eau les canaux existants, depuis des siècles pour certains, dont les canaux Saint-Julien 12ème siècle, Craponne 16éme.
  4. Rétablissement du potentiel de pointe de la chaîne Durance, par sa transformation en Station de Transfert de l'Énergie par Pompage, STEP
    La procédure immédiate 1-2-3 rétablit la vie de la rivière et le rechargement de ses nappes phréatiques. En luttant ainsi contre la sécheresse, elle sauve la ressource vitale en eau et amorce le rétablissement du potentiel hydroélectrique qui s'effondre avec la sécheresse.
    On peut améliorer ces effets positifs et rétablir la production hydroélectrique de pointe, quelles que soient les sécheresses à venir, en transformant le chaîne hydroélectrique en STEP, comme Ste-Croix du Verdon.
La STEP Durance, un escalier à eau réversible
La Step Durance, un escalier à eau réversible
L'eau, turbinée aux heures de pointe, descend. Elle est remontée aux aux heure creuses.
La STEP fonctionne donc à volume constant :
 
  •  • Sa production de pointe est garantie quelles que soient les sécheresses à venir.
  •  • L'eau qui tombe sur le bassin versant de la Durance retrouve son cours naturel.
Il y a 20 ans que la Mission Interministérielle Durance a validé la proposition de STEP. Aucune étude n'en a été faite…

III - 1 - Compléments à nos propositions : La nappe de Crau, ressource vitale, a un besoin urgent d'eau.

En 1966, la dernière branche du canal usinier a été mise en eau. Elle est à la cote 123 sur le premier bief, Mallemort-Salon. C'est aussi la cote de dérivation, depuis la Durance, des quatre canaux qui traversent la Crau, des deux qui longent le pied des Alpilles et de celui, rive droite, qui va vers le Vaucluse.
À leur création et jusqu'en 1966, ces canaux chômaient pendant 3 semaines d'hiver, pour entretien.
Depuis 1966, ces canaux dérivent du canal usinier et ils chôment d'octobre à mars. Leur eau est détournée dans le canal usinier. Elle est turbinée à Salon et Saint-Chamas.

Cet ultime détournement a des conséquences nuisibles sur la ressource en eau, du fait qu'il augmente les rejets dans l'étang, et aussi par ses effets sur la Crau et autres territoires :

  1. La nappe phréatique de Crau est alimentée par l'arrosage des prairies
    Alimentation de la nappe de Crau
    Interruption de la percolation de l'eau des canaux dans la nappe phréatique de Crau.

    270 000 personnes boivent son eau. Le SymCrau qui la gère s'inquiète depuis longtemps de son mauvais état encore aggravé cette année par la sécheresse.
    La faiblesse de la nappe d'eau douce favorise la remontée de la nappe salée. Le BRGM surveille le « Le biseau salé » qui menace l'agriculture de Camargue et l'approvisionnement domestique d'Arles.
  2. Interruption de la production des moulins et micro-centrales actionnés par cette eau.
    À l'origine de la construction des canaux il y a l'objectif d'actionner des moulins à eau. Cette fonction a disparu au fil des décennies. Mais aujourd'hui les syndicats d'arrosants la rétablissent. Elle leur procure un revenu qui leur permet de faire face à des difficultés financières.

La sauvegarde de l'agriculture de Crau est une partie de la sauvegarde de l'eau : elle est une priorité absolue.

Et nous devons souligner et dénoncer les destructions de terres agricoles irriguées pour construire des hangars gigantesques qui imperméabilisent les surfaces et qui limitent la recharge de la nappes phréatique de Crau à une quantité réduite d'eau préalablement polluée par le trafic routier.

    La remise en eau permanente des canaux à la cote 123 est nécessaire, évidemment possible, en collaboration avec leurs gestionnaires.

    III - 2 - Complément sur le gaspillage massif de l'eau déversée dans l'étang de Berre

    Le déversement de l'eau du canal usinier dans l'étang de Berre n'a rien à voir avec le déversement de l'eau d'un fleuve dans la mer. La quasi-totalité de l'eau de la Durance, passe dans le canal usinier. Ce canal en béton est étanche. Pas un goutte d'eau ne s'en échappe pour rejoindre une nappe phréatique. Il n'entretient aucune vie aquatique ou terrestre. On ne peut plus en dire « l'eau c'est la vie ». L'eau du canal n'est qu'un agent industriel. Très dangereux : c'est un piège qui a coûté la vie à de très nombreuses personnes. Et lorsque cette eau est déversée dans l'étang, elle est dénaturée, inutilisable, gaspillée et elle détruit l'étang !

    Pendant son parcours, l'eau du fleuve entretient une vie aquatique, terrestre, naturelle ou par irrigation de cultures, une vie domestique pour les besoins élémentaires des populations. Arrivée à la mer, loin de la tuer, l'eau du fleuve lui apporte des nutriments qui contribuent à la richesse bien connue de ce milieu estuarien.

    IV - Achever la réhabilitation de l'étang de Berre et celle de la Durance

    Les mesures immédiates pour la sauvegarde de l'eau et de la Durance, ne réhabiliteront pas la rivière et l'étang de Berre. Des mesures complémentaires sont nécessaires à cette fin.

    Sans oublier que, « Si rien n'est fait » : Réunis à Lyon en décembre 2014, les experts du climat ont averti :
    « Si rien n'est fait, d'ici 2050, l'étiage du Rhône diminuera de 30 %, celui de la Durance de 50% ».

    En décembre 2019, la COP 25 a pointé le risque pour 2050
    d'une « bascule » brutale du réchauffement du climat à +2° C.

    Au delà de 2050 : « L'été 2022 et ses extrêmes météorologiques pourrait être la norme après 2050. »

    Conséquences :
    1 - Le Rhône est incapable de refroidir les centrales nucléaires qui jalonnent son cours.Danger majeur !
    2 - À l'horizon 2050, la Durance oued, pénurie d'eau, incendies de la garrigue : le désert du sud de la France s'installe avec littoral disloqué de la Camargue aux Pyrénées, plages et lagunes disparues…

    V - L'eau, priorité absolue

    Nous vivons aujourd'hui, à l'échelle des terres de Provence, les prémices de la tragédie que Jean de Florette a subie sur un petit bout de ces terres, dans les collines du Garlaban. Le BTP joue ici le « papet », insatiable dévoreur de terres. EDF est Galinette. Opérateur un peu niais des manigances du Papet, il a coupé l'eau dans la rivière. Et le soleil toujours plus chaud, l'air et le sol toujours plus secs désertifient la région.

    Instruits par cette tragédie, nous ferons en sorte d'échapper au sort de Jean des collines pour le malheur de sa fille Manon des Sources.

    Les intérêts vitaux de cinq millions d'habitants et des 3 millions de visiteurs annuels de PACA sont en jeu, ils sont déjà atteints par la réduction de la ressource en eau et par la dégradation de sa source principale, la Durance.

    L'Étang Nouveau propose à tous les organismes représentant les populations et aux citoyens, d'ouvrir un débat, commune par commune, pour la sauvegarde de la ressource en eau et de sa source principale, la Durance.
    L'Étang Nouveau propose un débat de conscience, à chaque citoyen :
    L'Étang Nouveau apporte au débat la contribution présentée ci-dessus. Les propositions complètes élaborées à partir de son analyse de l'aménagement de la Durance décidé par la loi 55-6 du 5 janvier 1955, sont consultables ici.

    Que celui qui n'a jamais bu son eau, s'abstienne de défendre la Durance.

    Mobilisation,
    conscience par conscience,
    commune par commune,
    pour la sauvegarde de la ressource en eau,
    pour la réhabilitation de l'étang de Berre et de la Durance.